Elle met en scène treize participants, habillés de blanc, dont l’histoire personnelle est marquée par l’immigration. Cette procession chemine dans le quartier de la Bourse de Commerce. Les performeurs actionnent continuellement des moulins à café manuels. Le mouvement de leurs bras est une métaphore des mécanismes du monde, des forces à l’œuvre, et du labeur des immigrés ayant contribué à la construction et à la prospérité de nos sociétés. En tombant au sol, le café moulu laisse une trace sombre et une piste olfactive que le vent disperse. Son odeur stimule une mémoire collective, affective, qui jamais ne supplante les tragiques relents de l’Histoire. Paulo Nazareth les met à jour avec cette performance. À travers l’évocation de la culture du café — dominée pendant des siècles par les colons sur la base de l’asservissement — il évoque la mémoire de l’esclavage et expose la férule imposée encore aujourd’hui aux pays du Sud par l’Occident, en particulier à travers la surexploitation des ressources.
Dans le contexte de la Bourse de Commerce et de l’iconographie de ses grands décors peints, largement ancrés dans cette culture coloniale et impérialiste — à la fois étudiée et mise à distance par le nouveau musée —, cette performance fait écho au passé marchand du lieu, place d’échange et de spéculation sur les matières premières alimentaires venues du monde entier depuis la fin du 19e siècle.
Avec la participation d’Ibrahim Adam, Ibrahim Dialo, Abdu Kadr Faye, Kingo, Yannos Majestikos, Tickson Mbuyi, Astrid Mvoula, Grace Nitoumbi, Cynthia Tell, D27, Perlige Sita. Sous la direction de Fabrice Kalonji.
Paulo Nazareth
L’oeuvre de Paulo Nazareth (né en 1977 à Governador Valadares au Brésil) est souvent fait de gestes précis et simples, qui ramifient plus amplement, résonnent, sensibilisant le plus souvent à des thèmes comme l’immigration, les effets de la globalisation, le colonialisme, l’identité, les questions de races et de racialisation. Elle se construit à travers des vidéos, des photographies, des objets trouvés, mais son medium le plus significatif est sans doute le faisceau des relations, des rencontres que l’artiste cultive avec les personnes croisées en chemin, souvent les plus invisibles et sans statut. Ses oeuvres ont été présentées par la Pinault Collfection dans les expositions «Dancing with Myself» à Essen en 2016 puis à la Punta della Dogana en 2018 ainsi qu’à «Debout !» à Rennes en 2018.
L’atelier des artistes en exil
Structure unique en France, l’atelier des artistes en exil (aa‑e) a pour mission d’identifier des artistes exilés, de toutes origines, toutes disciplines confondues, de les assister dans leurs démarches administratives et artistiques, de proposer des espaces de travail et une mise en relation avec des professionnels de l’art et de la culture. La structure bénéficie de 1000 m² situés au coeur de la capitale dédiés à la pratique artistique. Elle reçoit le soutien de la ville de Paris, du ministère de la Culture, du ministère du Travail, de l’Onda et de fondations privées. L’aa-e est lauréat du Prix Culture pour la Paix 2018 des fondations Jacques Chirac et Culture et diversité et du Prix d’excellence professionnelle Womex 2020.