
Concerts, performances et cartes blanches musicales rythment une programmation live inédite qui rend hommage aux artistes de l’exposition « Corps et âmes », dont l’artiste américain Philip Guston exposé en Galerie 4.
Entrée libre au cours de l’évènement, en toute discrétion.
La Bourse de Commerce présente For Philip Guston, une pièce pour flûte, piano et percussions du compositeur américain et figure de la musique contemporaine Morton Feldman, interprétée dans la Rotonde par deux musiciens solistes de l’Ensemble intercontemporain, Emmanuelle Ophèle (flûte) et Aurélien Gignoux (percussion), et par Ninon Hannecart-Ségal (piano).
Composée en 1984, For Philip Guston est l'une des œuvres majeures de Morton Feldman, un hommage poignant à son ami peintre disparu en 1980. Cette pièce d’une durée d’environ quatre heures – écrite pour flûte, piano et percussions – s’étire dans le temps, renonçant à tout développement dramatique, au profit d’une contemplation fragile. L’œuvre tisse des motifs instrumentaux subtils, marquées d’infimes variations rythmiques, où les sons semblent suspendus, comme en apesanteur.
Le compositeur Morton Feldman (1926-1987) et le peintre américain Philip Guston (1913-1980) ont entretenu une relation amicale et artistique intense, bien que leur lien se distende à la fin des années 1960, leur rupture se cristallisant autour de divergences esthétiques. À cette époque, Philip Guston abandonne l’abstraction au profit d’une peinture figurative, un choix désapprouvé par Morton Feldman : « un jour, il est parti en Italie ; puis il est revenu et il s’est passé quelque chose ; son œuvre a commencé à changer, et lorsqu’il est venu à moi et m’a demandé : « Alors, qu’est-ce que tu en penses ? », je suis resté silencieux pendant trente secondes, et cette demi-minute nous a coûté notre amitié. »
Cette amitié perdue trouve un écho dans Friend – To M.F. (1978), une peinture de Philip Guston représentant le compositeur, fumant comme à son habitude, la tête légèrement détournée. Dix ans plus tard, à la mort du peintre, Morton Feldman perçoit la liberté radicale de son geste artistique, et dira de lui : « il a cessé de se poser des questions ». À cette époque, Morton Feldman remarque l’évolution de sa propre pratique, choisissant désormais de composer des œuvres musicales sans se soucier de leur longueur.
« La raison pour laquelle la pièce s’intitule For Philip Guston, c’est que, au cours des huit dernières années de sa vie, nous n’avons pas communiqué. Malgré cela, il avait demandé à sa famille – il savait qu’il allait mourir – de me demander de lire devant sa tombe le kadish. Ce que j’ai fait. » Morton Feldman, Écrits et Paroles.

Le compositeur américain Morton Feldman (1926-1987) est l’une des figures majeures de la musique contemporaine. Pionnier, aux côtés de John Cage, de la musique indéterminée et aléatoire, ses pièces instrumentales sont souvent prévues pour des groupes inhabituels d'instruments et font l'objet de systèmes de notation musicale expérimentaux. Né en 1926 à New York (États-Unis), dans une famille juive d’origine ukrainienne, il commence à étudier le piano avec Vera Maurina Press, qui avait côtoyé le pianiste russe Alexandre Scriabine et dont l’influence se retrouve dans ses premières compositions. En janvier 1950, lors d’un concert du New York Philharmonic, Morton Feldman rencontre John Cage. Peu après, il emménage dans le même immeuble que lui, la Bossa’s Mansion, située sur Grand Street, près de l’East River. Avec l’arrivée dans l’immeuble de Christian Wolff, d’Earle Brown et de David Tudor, naît autour d’eux la « New York School ». Parmi les œuvres majeures de Morton Feldman figurent notamment Rothko Chapel (1971), Piano and String Quartet (1985) et Triadic Memories (1981).
Né à Montréal (Canada) en 1933 et décédé en 1980 à New York (États-Unis), Philip Guston (né Phillip Goldstein) grandit à Los Angeles (États-Unis) dans une famille d’émigrés juifs ukrainiens. Ses peintures, d’abord abstraites, font de lui l’un des fondateurs, aux côtés de Jackson Pollock et Willem De Kooning, de l’expressionnisme abstrait, mouvement de l’avant-garde artistique new-yorkaise de l’après‑guerre. Fortement engagé dans le mouvement pour les droits civiques, Philip Guston réalise également une œuvre marquée par son engagement politique. Dans un style cartoonesque, ses dessins satiriques et ses caricatures du président américain Richard Nixon font scandale, tout comme les apparitions régulières de membres du Ku Klux Klan dans ses peintures figuratives, qui ne sont pas sans rappeler son combat contre cette organisation suprémaciste et raciste.
Emmanuelle Ophèle, flûte
Aurélien Gignoux, percussion
Ninon Hannecart-Ségal, piano
Emmanuelle Ophèle étudie avec Jean-Pierre Chambon, Patrick Gallois et Ida Ribera, avant de poursuivre sa formation dans la classe de Michel Debost au Conservatoire de Paris (CNSMDP), où elle obtient un premier Prix de flûte. Emmanuelle Ophèle entre à l’Ensemble intercontemporain à 20 ans. Attentive au développement du répertoire et aux nouveaux terrains d’expression offerts par la technologie, elle prend rapidement part aux créations recourant aux techniques les plus récentes : La Partition du ciel et de l’enfer pour flûte Midi et piano Midi de Philippe Manoury (enregistré chez Adès) ou ...explosante fixe... pour flûte Midi, deux flûtes et ensemble instrumental de Pierre Boulez (enregistré chez Deutsche Grammophon). Elle participe également à l’enregistrement du Marteau sans maître (Deutsche Grammophon, 2005, sous la direction du compositeur).
Très tôt attiré par les percussions, Aurélien Gignoux étudie au Conservatoire de Toulouse où il découvre de multiples instruments : vibraphone jazz, batterie, piano et percussions. Il affine sa palette sonore dans la classe de marimba d’Éric Sammut au CRR de Paris. Après avoir intégré le Conservatoire de Paris (CNSMDP) dans la classe de Gilles Durot en 2016, il perfectionne son approche de l’orchestre et des timbales en Allemagne auprès des solistes des Berliner Philharmoniker et du Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, puis lors d’académies internationales et au sein de grandes formations françaises (Orchestre de Paris, Orchestre philharmonique de Radio France). Développant aussi sa pratique soliste et chambriste, il intègre en 2019 le Trio K/D/M et cofonde la compagnie Les Insectes de Bastien David autour d’un instrument de percussion microtonal, le métallophone. Depuis son entrée à l’Ensemble intercontemporain, il aborde la txalaparta basque, le Cristal Baschet et le cymbalum. Aurélien Gignoux est artiste percussion Kolberg et artiste clavier Bergerault. Il est notamment lauréat du Concours international de musique de l’ARD 2019 (2e prix) et a été sacré « Révélation » des Victoires de la Musique classique 2021.
Diplômée du CNSM de Paris, Ninon Hannecart-Ségal a été aussi révélation classique Adami en 2021, et a suivi la promotion Debussy à l’Académie Jaroussky pour la saison 2022-2023. Aujourd’hui Artiste en Résidence à la Fondation Royaumont, cette pianiste claveciniste se distingue comme l’une des rares spécialiste du clavecin moderne. Elle a joué dans de de nombreux lieux : la Maison de la Radio et de la Musique (où elle enregistre Komboi pour clavecin et percussion lors du week-end Xenakis 2022 ); la Scala Paris (où elle crée son programme Queendom pour piano et clavecin moderne) ; ou encore le festival Radio France Montpellier Occitanie. En 2025, elle a ouvert le Festival Présences avec le concerto pour piano préparé de MengHao Xie à l’Auditorium de Radio France.